Le 12 septembre dernier, la Commission européenne a déposé, auprès du Parlement Européen et du Conseil de l’Union Européenne, un projet de directive relative aux prix de transfert visant à harmoniser la réglementation au sein de l’Union Européenne. La directive consacre les principes de l’OCDE (Organisation de coopération et de développement économiques) qui sont déjà appliqués dans la plupart des pays, notamment en France.
Nous allons voir ensemble que la directive consacre le principe de pleine de concurrence et ne modifie pas fondamentalement l’existant, mais permet l’établissement d’une norme européenne sur un sujet transnational.
La réaffirmation du principe de pleine concurrence :
Le projet de directive réaffirme dès ses premiers articles le principe de pleine concurrence et les conditions générales de son application. Il s’agit d’une norme internationale, définie notamment par l’OCDE, qui prescrit que les entreprises associées doivent se comporter comme des tiers indépendants sur un marché concurrentiel. En d’autres termes, les opérations entrent, elles doivent refléter le résultat qui aurait été obtenu si les parties n’étaient pas associées notamment en ce qui concerne le prix et la marge.
L’objectif est de contrer une baisse des résultats fiscaux en augmentant artificiellement les charges et en diminuant le résultat imposable.
Les dispositions du projet devraient s’appliquer dès lors qu’une des deux entreprises associées est établie ou imposable dans un État membre de l’Union européenne. Cette directive souhaite sécuriser le cadre juridique concernant les opérations intragroupe transfrontalières et non pas les opérations qui ont lieu dans un même État.
Cela s’explique notamment par le fait que les transactions faites dans un même État présentent finalement peu de risque au niveau du groupe de provoquer une diminution des charges fiscales et ainsi de distordre le marché.
La nouveauté de cette directive réside surtout dans la définition qu’elle donne du terme « entreprise associée », ou liée. En effet, son article 5 retient différents critères non-cumulatifs :
- L’influence significative dans la conduite des affaires ;
- La détention de 25 % ou plus des droits de vote ;
- La détention directe ou indirecte de plus de 25 % du capital social ;
- Le droit de prétendre à 25 % ou plus du bénéfice d’une entité.
En comparaison, en droit interne, les dispositions du code général des impôts retiennent une définition moins restrictive d’une entreprise associée dans le cadre de l’application de l’article 57 du CGI.
Dans les cas où les prix pratiqués dans les opérations intragroupe ne respectent pas le principe évoqué ci-dessus, le projet de directive prévoit des dispositifs d’ajustements que devront mettre en œuvre les autorités fiscales des États-membres et par les sociétés.
Parmi les dispositifs, on retrouve :
- Un redressement en matière de prix de transfert effectué par les autorités fiscales à l’issue d’un contrôle.
- Un dispositif d’ajustement permettant d’éliminer la double imposition née d’un redressement pour l’entreprise liée à l’opération redressée.
- Un dispositif d’ajustement à l’initiative de l’entreprise. Ainsi, le contribuable pourra ajuster le profit des entreprises liées afin de respecter le principe de pleine concurrence.
L’harmonisation des règles clés dans le droit interne des États membres de l’Union Européenne.
Dans un premier temps, la directive veut harmoniser l’identification et la délimitation précise, d’une part, des relations commerciales et financières des entreprises associées et d’autre part, de la ou des transactions effectives entre les entreprises associées.
Cette identification et cette délimitation devront se faire selon les critères suivants :
- Une compréhension préliminaire générale du secteur industriel dans lequel les entreprises associées opèrent et des facteurs affectant la performance des entreprises opérant dans ce secteur ;
- Une analyse de la façon dont chaque entreprise associée fonctionne, pour identifier ses activités commerciales ou relations financières avec les entreprises associées ;
- Une analyse des caractéristiques économiquement pertinentes des transactions contrôlées, eu égard à la fois à leur forme et le fond.
Par ailleurs, le projet reprend la définition des cinq méthodes de prix de transfert reconnues par l’OCDE, à savoir :
- La méthode de prix comparable sur le marché ;
- La méthode du prix de revente ;
- La méthode du coût majoré ;
- La méthode de la marge nette transactionnelle ;
- Et la méthode de partage des bénéfices.
Le projet de directive laisse la possibilité aux entreprises associées, d’utiliser une autre méthode à la condition de justifier qu’aucune des cinq méthodes reconnues ne soient applicables.
Les entreprises associées devront mener l’étude comparable et conserver les résultats afin de justifier leurs transactions. L’ensemble de ces dispositions vont permettre la transparence et faciliter le contradictoire en cas de contrôle pour analyser les prix de transfert.
Lorsque l’application des méthodes de prix de transfert produit un intervalle de valeurs, l’intervalle de pleine concurrence doit être déterminé en utilisant l’étendue interquartile des résultats des comparables non contrôlés. Le projet précise l’intervalle interquartile devant être pris et consacre un raisonnement logique, à savoir :
- C’est l’intervalle allant du 25e au 75e percentile des résultats dérivés des comparables non contrôlés.
Si les résultats des méthodes se situent dans cet intervalle, il n’y aura pas besoin de procéder à un ajustement, à l’exception qu’un positionnement différent spécifique dans la fourchette est justifiée par les faits et les circonstances.
Dans le cas, où les résultats de la méthode indiqueraient un prix en dehors de l’intervalle du prix de pleine concurrence, il y aura lieu de subir un redressement en fonction de la médiane de l’intervalle à moins qu’il ne soit prouvé qu’un autre point de la fourchette détermine une prise de prix de pleine concurrence plus approprié.